Retour sur « Le STO dans le Gard »

QUAND LA FRANCE VENDAIT SA JEUNESSE À L’ALLEMAGNE

Le sigle STO ne dit plus grand chose à la plupart des Français d’aujourd’hui. Seuls les plus anciens se souviennent qu’il signifiait Service du Travail Obligatoire. Et qu’il marqua, avec la complicité de l’État Français dans la déportation des juifs, le sommet de la Collaboration entre le gouvernement du maréchal Pétain et l’Occupant.

C’est une véritable machine de guerre que les Nazis vont édifier pour envoyer, par trains entiers, de jeunes français de vingt ans travailler en Allemagne dans les usines et les fermes à la place des ouvriers enrôlés dans l’armée et expédiés dans toute l‘Europe pour dominer les pays conquis (de la France à l’Ukraine, de la Pologne à la Grèce).

L’Etat Français édicte une série de lois pour permettre la réquisition, par les forces de l’ordre au besoin, d’un nombre de plus en plus grand de travailleurs. En trois ans, ce sont trois millions de français qui furent mis au service de l’économie allemande. De gré ou de force.

On assiste alors à une véritable escalade juridique de lois et décrets qui légalisent le pillage des forces économiques françaises. Au début, en 1942, on fait appel à des volontaires, et il se trouve quelques dizaines de milliers de chômeurs français, pour aller travailler en Allemagne, où ils découvrent des conditions de travail qui n’avaient rien à voir avec ce qui était annoncé.

Puis, comme l’appel au Volontariat ne produit pas assez d’engagements, une loi va instituer un Échange : pour trois français partis travailler outre-Rhin, un prisonnier reviendra au pays (dans les stalags il y a plus d’un million de soldats capturés en 1940 pendant l’Offensive allemande). Cette politique baptisée Relève échoue à son tour, et ce d’autant plus que les Allemands ne renvoient pas autant de prisonniers que promis.

C’est alors que le ministre nazi de la main d’œuvre, Fritz Sauckel, pousse le gouvernement de Pétain à voter la loi instituant le STO dans la Zone Occupée. Et c’est Laval qui l’étend à la Zone Sud. On est en février 1943. Un recensement a lieu. Les gendarmes viennent réquisitionner ceux qui ne se présentent pas aux convocations. Dès le mois de mars des convois de trains emportent en Allemagne par milliers des Français dans la fleur de l’âge. Au début, il y a des exemptions : les agriculteurs, les mineurs de fonds, les étudiants, les infirmes. Mais bien vite Sauckel réclame des contingents de plus en plus nombreux. Les sursis universitaires sont annulés, les mineurs sont arrêtés à la sortie de la mine, les infirmes sont expédiés sans ménagement par des médecins français complaisants (tel Paul Anvesio, ancien curé du Grau-du-Roi, que ses pieds-bots n’ont pas soustrait au coup de filet). Les jeunes garçons enrôlés par la force vécurent en tant que déportés du travail un esclavage de masse exposés au froid, à l’insalubrité et à la faim.

Mireille Justamond, membre de l’Académie de Lascours a présenté les fruits de ses recherches devant une audience venue nombreuse à « La Salle » à Pont Saint-Esprit. L’historienne, sensibilisée par son père et son cousin, arrêtés au sortir de la mine et déportés du travail à Breslau (de juillet 1943 à mai 1945) a su retracer avec rigueur et précision, et avec tout autant d’émotion, la mise en place implacable de cette Contrainte invraisemblable.

Crédit photo : Eric CASTEL © Paris – Musée de l’Armée

Scroll to top